30 millions d'habitants de l'UE font partie de minorités ethniques autochtones, à peu près 8% de la population de l'UE. La situation concrète de ces populations dans leur Etat varie largement. Une étude de la commission de l'UE ("Euromosaic") a révélé un état globalement peu satisfaisant. Parmi les 48 langues minoritaires des 12 Etats-membres de l'UE de l'époque, 23 n'ont qu'une chance de survie restreinte ou aucune chance de survie. L'étude considère la situation de 12 autres communautés linguistiques comme dignes d'amélioration. Cela est surtout valable pour les Etats qui négligeaient traditionnellement la protection et la sauvegarde des ethnies et des langues minoritaires.
extrait de l'article de Thomas Benedikter, Vorsitzender der Gesellschaft für bedrohte Völker - Südtirol paru dans l'EM 4/97.
On ne peut guère supposer qu'il est conforme à l'autodétermination libre d'une communauté ethnique de disparaître lentement de la surface de la terre. L'existence d'un mouvement fort pour l'amélioration immédiate du statut légal d'une minorité n'est cependant guère à la mesure des menaces dont les différentes minorités sont victimes. Certaines minorités n'ont plus la force de s'organiser d'une manière efficace. D'autres petits peuples sont pourtant organisés, mais se sentent discriminés dans leur Etat ou dans l'UE.
Qu'est-ce que l'UE fait pour améliorer cette situation peu satisfaisante? En principe très peu, comme l'UE n'a aucune base légale pour envisager des mesures efficaces dans les différents pays-membres. Ainsi la Commission de l'UE ne pourrait pas prescrire à la France d'enfin introduire en Bretagne la langue bretonne dans l'instruction publique ou de reconnaître en Corse le corse en tant que deuxième langue officielle. Sur la base de trois résolutions du parlement de l'UE, celle-ci finance un institut pour les langues peu répandues qui peut dépenser annuellement 3,5 millions d'écus. Cet institut a lancé quelques initiatives pour le soutien des langues minoritaires sans cependant intervenir dans les domaines décisifs pour la protection des minorités, qui continuent de relever de la compétence unique des Etats. Malgré une certaine utilité pratique, cette politique constitue seulement une feuille de vigne cachant les lacunes de la politique dans ce domaine. L'UE reste consciente de cet aspect problématique , les Etats-membres ont cependant exclu intentionnellement toute compétence de l'UE dans ce domaine. Les bases légales pour un instrument communautaire par rapport à la protection des minorités manquent.
Il est alors assez paradoxal que l'UE réclame, dans le cadre de la politique étrangère commune, la protection des minorités: en 1991 elle a exigé de la part des Etats de l'Europe orientale comme condition de la reconnaissance politique et de l'adhésion au Conseil de l'Europe le respect de standards minimaux par rapport à la protection des minorités ethniques. De même, dans "l'agenda 2000" sur l'élargissement de l'UE, la commission de l'UE évoque le problème des minorités dans les pays de l'Europe orientale voulant adhérer à l'UE. Le ton est optimiste - cependant sans raisons suffisantes. Comme par rapport à l'intérieur, l'UE reste inconséquente à l'égard de l'Europe de l'Est. Bien qu'aucun Etat n'ait mis en pratique une protection suffisante des minorités, tous les Etats ont été reconnus, même la République Fédérale de Yougoslavie. L'accroissement de la conscience par rapport aux problèmes au niveau de l'Europe entière n'a rien pu changer à la discrimination réelle des minorités au sein des pays-membres de l'UE.
Lors de la conférence gouvernementale pour la révison du traité de Maastricht en 1996 et de la conférence d'Amsterdam en 1997, l'UE n'a pas progressé dans ce domaine. L'organisation faîtière des groupements ethniques FUEV a demandé qu'on introduise dans le nouveau traité la possibilité de protéger les minorités nationales autochtones par des mesures communautaires. Le parlement de l'UE a soutenu cette idée à travers le projet du Tyrolien du sud MdPE Michl Ebner qui réclamait: "La diversité de l'Europe doit être réglée, dans le cadre des droits de l'homme, de la démocratie et de l'Etat de droit, par la protection particulière des minorités qui y résident traditionnellement." Il se pose évidemment la question de savoir dans quelle mesure une telle proposition si générale pourrait obtenir un effet légalement contraignant sur la politique des pays-membres de l'UE par rapport à leurs minorités. Le refus de cette proposition très générale montre cependant la distance qui sépare l'UE d'une politique active par rapport aux droits fondamentaux et à la protection des minorités ethniques.
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